Benoit Labourdette est un multi-instrumentiste du cinéma. Agé de seulement quarante ans, il a déjà, semble-t-il, fait le tour de la question : réalisateur, producteur, technicien, enseignant, organisateur d’événements.
En 2005, lorsque le Forum des images, à Paris, et la marque de téléphonie SFR, se sont mis en quête d’une personnalité capable d’organiser un festival international autour du cinéma par téléphone portable, devinez à qui ils ont pensé ?

« Sans démagogie, je dirais que tout le monde a accès à la création aujourd’hui. Bien sûr, tout le monde ne fera pas de films, mais tout le monde peut le faire. Et Takavoir dit ça justement ! »

Bonjour Benoît. Selon toi, d’où vient ce projet étrange de faire des films par téléphones portables ?

Cette idée de vouloir miniaturiser les outils de prise de vue n’est pas nouvelle. Disposer d’un outil maniable qui pourrait faire évoluer l’écriture a toujours compté. Le concept de la caméra stylo date des années 50. La fameuse caméra Paluche a été inventée dans les 70′s. En quelques sortes l’idée de la Nouvelle vague est de s’affranchir du poids de la caméra, de la faire entrer dans la vie… L’idée serait de faire des films comme on écrit des livres, sans le poids de la technique… Le portable s’inscrit dans une histoire.

Qui est à l’origine du projet de festival parisien Pocket Films, premier du genre ?

Fin 2004, le Forum des images et SFR (la marque de téléphonie mobile) se sont rencontrés pour plancher sur un nouveau concept. SFR voulait aller au-delà de la publicité, la marque voulait appuyer son image sur un événement innovant. Le Forum des images a pensé à moi pour le mettre en oeuvre. Mes divers champs de compétences les ont intéressés.

Le festival a duré 5 ans, de 2005 à 2010. La fin n’a pas été trop amère pour toi ?

Non. On savait dès le départ que SFR se retirerait du projet à un moment ou à un autre. Ils ont par changer de stratégie, c’était prévu. Aujourd’hui la marque s’est développée et va bien au-delà de la téléphonie. Pocket films devenait trop restrictif pour elle.

A titre personnel je suis content de voir que le Forum des images a maintenu le site internet en ligne. Il subsiste comme une mémoire de cet événement. Et puis aujourd’hui je suis parti sur un nouveau projet : le Festival caméras mobiles, qui se tiendra du 14 au 17 avril à Valence, entre autres.

Que penses-tu de l’initiative du festival Takavoir ? A priori du bien, car tu en étais le parrain en 2010.

Oui bien sûr, même si je n’ai pas pu suivre la première édition. J’avais confié des films pour une carte blanche à Pocket films. Je trouve que c’est une super initiative, c’est important d’ancrer ces pratiques de réalisation dans le tissu culturel, social et éducatif. Il faut bien comprendre qu’il ne s’agit pas d’un simple phénomène de mode, mais cela témoigne du fait qu’il se passe quelque chose d’important dans la société.

Que penses-tu du fait d’imposer un thème pour le festival, à la différence de Pocket films ?

A l’époque, Pocket films accompagnait une toute nouvelle technologie. On était plutôt dans la découverte et dans l’ouverture totale à tout. On voulait pouvoir relater tout ce qui se passait. Nous considérions qu’il était déjà assez difficile de faire un film avec un téléphone pour en plus restreindre la créativité. Le thème était déjà « faites un film avec un portable. »

Takavoir arrive plusieurs années après. Aujourd’hui beaucoup de films ont déjà été tournés avec des téléphones. Takavoir crée sa propre identité. Il n’y a pas de comparaison à faire avec Pocket films.

Pourquoi avoir accepté de rejoindre le jury de Takavoir ?

Il s’agit d’un vrai projet. La démarche du festival est vraiment liée à sa dimension sociale, il a du sens pour moi. Quand on fait les choses avec les gens, quand le cinéma est incarné dans la vie, je suis toujours partant. J’entends soutenir cette dynamique.

Sans démagogie, je dirais que tout le monde a accès à la création aujourd’hui. Bien sûr, tout le monde ne fera pas de films, mais tout le monde peut le faire. Et Takavoir dit ça justement !

Propos recueillis par Karl Duquesnoy